y a les vagues, et les rochers, et le sable, et les coquillages, et les bigorneaux. et leur roi. le grand géant de chair. dans ses grandes mains, les grands méchants battoirs, il y a des minuscules crabes, blancs, et noirs, et gris et oranges, comme des tourteaux minuscules. et dans le ciel il y a comme un vrombissement, une machine merveilleuse à rapprocher les gens. un faiseur d’amoureux volant.

et puis, sur les lèvres de térence, y a comme un sourire qui joue les timides. les lèvres sont courbées, comme une plume de perroquet, et le seigneur bigorneau, il a envie de rire. il rit comme un gosse, tout seul, toujours tout seul. parce qu’alors que tout le monde dit la vie triste, que tout le monde trouve l’univers dramatique et grave, lui, il a décidé que les planètes étaient des rochers, et l’éther d sable, et que les forces qui tendent le destin, comme un filet de pêche, ne sont rien de plus que le remous des vagues.

et dans ce rire, il y a des éclats, comme des bijoux qui se cassent, comme des bulles qui éclatent, comme du produit qui mousse. il y a quelque chose qui attend, qui espère, qui tend tout son corps de géant comme on tend un fil avant de le piquer dans le tissus. il attend d’être reprisé, comme chaque jour, comme si dans son coeur, il y avait un trou, et qu’elle, était un joli fil doré.

doré comme le sourire qu’il aperçoit au loin.

elle va vite et les nuages s'entassent à l'arrière. elle va vite et ça la fait rire, parce que même les oiseaux ils peuvent pas la doubler. filet rouge qui crève le ciel en deux morceaux couleur de la mer. il paraît que plus on va vite plus on sourit. alors papagena sourit de toutes ses dents et les insectes n'ont pas le temps de se poser sur son visage.
une seule destination : la plage. celle avec les gros rochers tous plats et les bigorneaux cachés entre les failles. elle n'a presque plus d'essence pour aller vite mais ce n'est pas grave. l'avion rouge atterrit comme sur du coton, sans faire de bruit (ou presque). le moteur vrombit, il aurait bien aimé voler un peu plus longtemps.

elle voit que lui maintenant, (pas si) loin, (trop) près même, et ses grands bras qu'elle n'a pas vu depuis longtemps. se jette dedans et sent ses grandes mains à lui trouver les siennes toutes petites après, ils s'embrassent pas parce qu'ils peuvent pas mais ils sourient (et ça suffit pour dire je t'aime).

t'as ramassé quoi aujourd'hui ? elle sait que dans les poches de térence il y a toujours des trucs qui brillent, des trucs jolis, des petits trésors à eux qui sentent bon l'adriatique lointaine et les dunes d'ici. des petits bouts d'aventure. des choses d'un autre monde, d'une autre vie. sauf qu'aujourd'hui marnie a, elle aussi, un morceau de légende. regarde, moi, j'ai pêché en mer un coffre en bois. moue désolée. mais j'arrive pas à l'ouvrir.

de tous les trésors qu’il garde dans ses poches, dans sa bicoque toute pentue, et toute petite, le plus brillant, le plus précieux, sera toujours celui de marnie. parce qu’elle n’a que ça à lui offrir, et n’attend rien d’autre qu’un deuxième sourire de lui. parce que jamais ce sourire n’a pris des airs méchants, parce que jamais elle ne l’a regardé autrement que comme lui, térence.

elle ne le z’yeute pas, elle n’est pas méchante, bien au contraire. elle est son petit oiseau, son rouge gorge à lui. il est pas grand chose d’autre que son crabe pour elle, peut-être un très gros crabe. mais quand elle le regarde, c’est comme si elle le prenait dans ses mains, et qu’elle l’enlaçait en entier. il sourit et sort de ses poches à rallonge des jolis cailloux, des trésors oubliés. une breloque par-ci, une chaussure d’enfant par là. et puis, au milieu des bricoles, une bidouille attire son attention. la bidouille précieuse.

alors il sourit et la glisse dans les mains de papagena, tout sourire, tout doux. j’ai trouvé une jolie boucle d’oreille. pas l’autre, peut-être qu’une autre princesse, un autre oiseau l’a volée. elle a l’air précieuse, et vieille aussi. mais pas rouillée, pas abîmée. c’est une perle qui l’orne, entourée d’autres cailloux brillants. il est pas très malin térence, il connaît pas les jolis noms, pour lui, tous les cailloux sont précieux, tant qu’ils brillent.

la pie voleuse.

il jette un regard derrière elle, vers le coffre, et il lui montre ses dents toutes tordues en un sourire qui fait peur aux petiots. mais pas à elle, jamais à elle. un trésor de pirates. je suis sûr que je peux l’ouvrir avec mes mains.