une bicyclette toute rouillée à peine réparée, gravée des initiales d'un illustre anonyme, rongées par la mer.
une petite bicoque bancale pour des gamins qu'ils ne sont plus tout à fait, aux escaliers irréguliers, et à la porte qui ferme mal.
un filet de pêche tout déchiré, trouvé au milieu des rochers, avec un tourteau pris dedans, qu'il s'est promis de recoudre.
une scie toute rouillée qu'il connaît par coeur et avec laquelle il a construit les plus jolies choses.
une vieille barque suspendue en haut contre laquelle il se cogne la tête.
un millier de coquillages un peu abîmés que les gens laissent de côté.
des vêtements troués et délavés par le soleil.
des poêles, des casseroles cabossées.
une boîte à bijou vieille comme le temps, dont il n'a pas la clé.
et sa paillasse par terre.

papageno il est grand grand comme un ogre.
et son prénom il sonne méchant.
térence la terreur.
il a des grandes mains aussi il pourrait tuer un homme avec.
il fait peur, oui, papageno.
il erre jour et nuit
et ne parle pas beaucoup.
et puis son sourire dévoile des dents pas très bien alignées.
un sourire de requin méchant.

mais il est pas méchant papageno.

il a toujours vécu là
avec maman
avec papa.
il les dépasse tous les deux
et de beaucoup.
il pourrait leur faire peur
térence la terreur.
mais pour les deux vieux pêcheurs
il n'est une terreur
que pour les tout petits bigorneaux.

avant il aimait une sirène.
elle avait des cheveux comme le feu
et des yeux comme la mer.
elle avait un rire charmeur
et elle chantait comme le soleil.
il avait peur de la casser
en caressant sa joue
mais elle, elle s'est cassée
avec un autre fils de l'eau.

il est resté tout seul, térence
avec l'air un peu bête
à regarder la mer
tandis qu'une fille regardait le ciel.
elle disait qu'elle voulait être un oiseau
qu'elle aurait un avion
et qu'elle partirait des nuits entières
avec son papageno.
il ne savait pas ce que ça voulait dire.
il ne savait pas non plus
ce que voulait dire ce qu'il faisait
quand il a pris sa scie
des plans
des livres
que pour la première fois il a décidé de lire
et construit un avion.

il lui paraisait immense.
immensément magnifique
peint tout en rouge
même s'il préfère le bleu.
il y avait passé des heures.
plus qu'à voir s'il volait.
il a appelée la future aviatrice
l'a mis en marche
a attendu
attendu
attendu
et l'avion a décollé.

pourtant quand il l'a vu
à côté de la fille du ciel
il s'est senti bête une fois de plus
parce qu'il était ien petit cet avion
pour y faire rentrer une damoiselle.
c'était à peine plus qu'un joujou.
mais elle semblait heureuse.
tu les deux,
lui courbé sur elle
dans sa petite bicoque
enlacés pour toujours.
il l'aime.
le sait-elle ?
peut-être pas.
ou peut-être que si.
il n'est pas intelligent,
il ne sait pas cacher ce genre de choses,
papageno.